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mardi 30 juin 2009

La femme sans sexe Pt.1 : Je suis un homme.


Un jour, j'ai décidé de devenir un homme.
Je ne sais plus bien comment c'est arrivé ni pourquoi, mais finalement - quoi de plus naturel en somme?

D'abord, les garçons, c'est beau et ça a toujours plein de potes. Et en plus, c'est fort, ça n'a jamais peur de rien et ça n'a jamais besoin de personne tellement ils sont costauds. Les garçons, ça n'a jamais mal, c'est tout en muscles au dedans comme au dehors, et rien que de les regarder, ça se voit qu'ils ont un mental musclé. Moi, avec ma petite peau de fille, j'arrêtais pas de me cogner partout, de m'égratigner à chaque coin de rue, et mes yeux de fille n'encaissaient jamais le coup. Avec ma peau de fille, j'avais toujours des bleus qui disparaissaient pas, alors que je rêvais au contraire de d'avoir une peau d'homme toute couturée de cicatrices qui raconteraient mes aventures, une peau burinée, comme les cow boys, des batailles et des coups durs qui m'auraient toute balafrée mais dont je me serais remise toutes plaies fermées, avec juste une petite trace qui chuchoterait des mystères. Alors j'ai décidé de devenir un homme pour faire tout comme les hommes - et ne plus avoir à m'épiler, aussi.

C'est dur de devenir un homme à cent pour cent, en fait. J'ai trouvé tous les accessoires, tous les costumes, de la bande de copains à l'Aqua di Gio, des pintes de bière aux blagues graveleuses, les aventures sans douleur et les cicatrices dont on rigole. Ma peau de fille, elle, je l'ai enfermée très loin, et avec mes copains justement, on rigolait des pleurs qu'elle faisait, quelque part là-bas derrière mes os. Les filles, c'est nul, ça pleure tout le temps. C'est des chochottes et puis elles ont peut de tout. On est mieux entre mecs, pas vrai les gars?

Et puis j'ai rencontré quelqu'un - un homme justement. Et pas homo pour deux sous. Il a tout chamboulé mon identité sexuelle. Parce qu'avec lui, je n'ai pas envie de boire des pintes, de lui taper sur l'épaule ou de draguer dans les bars. Lui, j'aime pas quand il me parle de fille ou de ses cicatrices mystère. Avec lui, je voudrais avoir la peau et les mots doux, et pas les coincoin de canard qu'on ressort tout le temps en faisant des clin d'oeil à la bande. Lui, je voudrais lui cuisiner des gaufres et repasser ses chemises, pleurer sur son épaule en regardant des films nuls, l'admirer et le présenter à mes copines, et lui faire des crises de jalousie quand elles s'approchent trop près, et être chiante comme une fille, et avoir des réactions inexplicables comme une fille, et lui dire que je ne veux pas qu'il s'en aille parce que je tiens à lui, et ne plus avoir honte de mes sentiments mielleux de fille, et ne plus avoir honte d'être une fille, et ne plus avoir honte de dire que j'ai besoin de lui et de ses muscles d'homme parce que j'ai peur, toujours très peur que ma peau de fille se déchire. Avec lui, je voudrais redevenir une fille, pour qu'il m'aime comme une fille.

Mais j'ai pas les couilles pour ça.

mercredi 24 juin 2009

C'est les soldes.

- pas encore de photo -


* future scène d'un futur projet qui n'existera jamais. *



- Tu avais quelle veste quand on s'est rencontrés?

- Pardon?

- Tu avais quelle veste?
Je me souviens de
ton jean
ta chemise
ta ceinture
mais ta veste pas moyen.
Tu avais laquelle?

- Je ne me souviens pas.

- Comment ça? Tu ne te souviens pas?

Je me souviens de
ma jupe
je ne l'ai pas repassée depuis que tu l'as froissée
j'aime ses plis
les plis de ton corps sur elle.
Je me souviens de
mon t-shirt
qui porte encore ton odeur malgré les lessives
les adoucissants
ton parfum est incrusté dans chacune de ses fibres
à moins que ce ne soit de moi dont je parle
en moi que tu es incrusté.

Comment peux-tu ne pas te souvenir de la veste que tu portais?

- Ce n'est pas si important que ça, si?

- Bien sûr que c'est important, c'est même ce qui compte le plus. Si tu ne te souviens pas de la veste que tu portais, en quoi est-elle différente des autres vestes que tu as mises? Pourquoi serait-elle exceptionnelle, unique? et la musique qui passait? et les rues dans lesquelles nous avons marché? et les mots que tu m'as dits, les regards que tu as eus, les sourires que tu m'as tendus? la couleur du ciel? l'odeur du matin? le menu au restaurant? Si tu ne te souviens pas de la veste que tu portais, comment je peux croire que c'était une exception, que je ne fais pas partie d'une galerie d'autres vestes, d'autres musiques, d'autres rues, d'autres mots, d'autres regards, d'autres sourires, galerie de couleurs qu'on ne remarque plus, galerie de nourriture qu'on ne savoure plus - j'avais mangé un crumble, je n'ai jamais pu laver l'assiette. Je portais du gris et du vert, tu te souviens? Mais toi? Comment je peux croire que je suis une exception dans ta vie si même ta veste, si même ta veste tu ne t'en souviens pas, si elle n'est pas devenue suffisamment spéciale ce jour-là pour mériter une place dans le musée de ta mémoire? Comment je peux croire que tu tiens à moi si tu ne te souviens pas de quelle veste tu portais?
Allez
s'il te plait
dis-moi quelle veste tu portais ce jour-là.

- Je ne me souviens pas.

dimanche 21 juin 2009

Cryogénie


Sur le coin d'une table
entre un Caramel Macchiato, un muffin chocolat / noisettes et des valises
[sous les yeux]


Le soleil est parti en me laissant dans la nuit
une nuit de 365 jours.

Je ne suis pas assez couverte

[nerfs à vif
peau à vif
et nerfs à fleur de peau]

Je ne suis pas assez couverte
et moi
dans les courants d'air
j'attrape toujours froid.

Le soleil est reparti en soufflant derrière lui
et là
au milieu de mes
365 jours d'ennui
j'ai froid
j'ai froid
j'ai
...

j'ai comme des
stalactites dans la bouche
stalagmites dans le ventre
et la glace s'entasse de plus en plus autour de moi.
Elle monte sur mes pieds
mes chevilles
mes jambes
mes cuisses
glace dans la gorge
glace au coeur
glace en tête
glace

je ne suis plus que

glace

et la glace enfin
gèle la crécelle dans mon thorax
et la glace enfin
gèle la crécelle dans mon thorax

Je ne crisse plus
[les palettes sont bloquées]
les appels à l'amour sont éternués
et ma crécelle cesse de tourner.

La glace
tue les microbes
je n'ai plus la lèpre
et ma crécelle se tait
je n'ai plus la lèpre
et mes cris se taisent
je ne
dis
plus rien
je ne
sens
plus rien
je ne suis plus que
glace

ils ont
crié au génie
et
cryogénisé
ma vie
par le même coup

et la glace enfin
gèle la crécelle dans mon thorax
et la glace enfin
gèle la crécelle dans mon thorax.

lundi 15 juin 2009

Ce n'est rien

(c) S@nd


Ce n'est rien
ce n'est
franchement pas grand chose.
Il s'agit simplement de trouver le déclic
l'impulsion
l'impulsion de vie.
Il s'agit
vraiment
d'un tout petit rien.
Se redresser sans avoir peur
lever la tête
fièrement
regarder sans plus aucune crainte cette vie dans les yeux
et lui cracher à la gueule.
Alors
ce sera
l'apaisement
alors
tout ira mieux
car plus rien n'aura d'importance
car plus rien ne me fera peur.

Ce n'est rien
plus rien ne m'entravera
et j'irai droit de l'avant
je foncera à travers temps
et je défoncerai les murs
et je défoncerai le ciel
pour un peu plus de clarté
pour un peu plus de lumière.

Ce n'est rien
il suffit maintenant de
se lancer
y aller
ce n'est vraiment rien, après tout
ce n'est que
sept étages.

dimanche 7 juin 2009

Dos

Je suis là et puis tout d'un coup ça fait...
électrochoc
ton dos
tu sais, comme ces mecs qui se prennent une décharge électrique et qui restent plaqués sur le sol, les murs, les plafonds
Moi, je suis plaquée contre une vitrine
et je te vois derrière
de dos
ton dos
quelque chose a craqué là quelque part là dans un coin de tête
et c'est la
Déferlante
l'Electrochoc
la
Déferlante des images
des toi + moi en équation, l'isolation en solution
l'inconnue
n'est pas
en X
ça, non
ça, on connaissait
l'inconnue, c'était...
c'était quoi, déjà?

toi+moi

Je fais des calculs sur le tableau noir de ton dos, entre tes deux omoplates

Ne te retourne pas, non
pas maintenant, attends
laisse passer l'orage
là, je ne supporterais pas
non
affronter ton regard qui me rappellera que l'inconnue, c'est cette vitrine
la vitrine que je me trimballe partout autour de moi
et si je tends la main vers ton dos
ton dos
si je tends la main vers ton dos
ce sera froid
froid contre la vitrine
froid contre toi derrière la vitrine.

Alors ce dos-là, je le garde
j'ai l'habitude.

Mes histoires d'amour
sont toujours
vécues de dos