* Cause there's this tune I found that makes me think of you somehow and I play it on repeat *
(elle fait
tourner son briquet entre ses doigts. son regard fuit en presque larmes vers un
recoin derrière ma tête. elle avale une bouchée d’air.)
Je n’ai plus
vraiment le choix tu sais. Je ne vois pas très bien comment je pourrais faire
autrement. J’ai bien essayé d’anesthésier au Valium, de désinfecter au whisky,
de cautériser avec des cigarettes, mais ça aussi, il parait que c’est poison.
Alors autant utiliser cette chanson comme un vaccin pour t’expurger de mon
groupe sanguin. C’est moins nocif.
(et dans le fond,
toujours la même musique qui tourne autour de sa tête. les mêmes croches
pendent à ses yeux, qu’elle baisse vers son verre.)
C’est le choc
anaphylactique qui a été le vrai problème. Anaphylactique. C’est un peu long
comme mot, mais il faut bien ça pour décrire l’enchainement des événements. Ce
choc là, c’est quand ton corps réagit trop fort. Tu ne peux pas t’y attendre,
ça se passe en une fraction de battement de cils. Tu te crois blindé,
résistant, tu te découvres hypersensible, et tous tes signaux s’affolent. Et
là, tu vois, ça n’avait l’air de rien, mais toi, tu as été l’allergène de trop.
Un choc anaphylactique, c'est une réaction allergique exacerbée. Pour se défendre contre un corps étranger,
le tien – de corps – a un mécanisme de défense qui finalement te met en danger.
Comme quoi, c’est pas toujours si bien foutu tout ça. Ton cœur est sur le point
de craquer, alors ton organisme te balance une grosse décharge d’hormones pour
contracter tes artères et relancer une machine qui s’est glacée d’effroi, pour
que le sang continue au moins à approvisionner tes organes vitaux. Cœur,
cerveau, poumons. Selon lui, tu n’as besoin de rien d’autre.
(et puis aussi
tes mains.)
Le truc débile, c’est
que si cette décharge d’hormones est mal dosée…
(mal
dosée, tu es sûre ?
ses
yeux se plantent dans ma rétine.)
… ou s’il
y en a trop, je ne sais plus.
Disons
que si l’afflux de sang vers les organes est trop fort, alors c’est l’effondrement.
Le collapsus. C’est ton cœur qui t’envoie te faire foutre parce qu’il ne gère
plus la pression, et la pression dégringole. Il se rabat sur lui-même, muscle
creux et mou, il ne te sert plus à rien et te laisse gérer les conséquences.
(un
sourire bizarre.
il y a
de la buée sur les fenêtres.)
Dans
ces cas-là, il faut :
- chercher
l’hémorragie
- allonger
la victime
- la
rassurer
- la
couvrir
(une
rasade de whisky.)
Je
trouve ça doux comme réponse à un tel choc.
(mais
je ne l’ai pas fait avec toi.)
Non.
Mais moi, je me suis posée une voie veineuse directement reliée à la tireuse pour faire remonter la pression.
Mais moi, je me suis posée une voie veineuse directement reliée à la tireuse pour faire remonter la pression.
Mais
ça,
je t’ai
dit déjà.
Il
parait que c’est poison.
(press
play again.
un
sourire, moins bizarre, un vrai je crois.)
Tu sais
comment ça marche un vaccin ? Tu prends les agents infectieux contre
lesquels tu veux te défendre et tu les multiplies jusqu’à ce qu’ils mutent et
perdent leur caractère pathogène, leur dangerosité, jusqu’à ce qu’ils ne te
fassent plus rien. Et puis, tu te les injectes pour que tes lymphocytes B
mémoire s'habituent à leur présence et impriment bien que si cet agent là revient, il faudra rester calme et
repousser l’invasion.
(press play again. nuage de fumée.)
J’ai
écouté cette chanson tellement de fois qu’elle finira bien par ne plus rien me
faire. Et j’ai pensé tellement de fois à toi que tu finiras bien par me
déplaire. J’y travaille, en tout cas, à développer des anticorps contre le
tien.
(et si
ça ne marche pas ? si tu ne peux pas te débarrasser de moi ?
un
rire.)
Quand
je n’en pourrai plus de toi, je m’aspergerai de ton parfum et j’y foutrai le
feu. C’est comme ça qu’on endigue une épidémie.